Etoile 18 - Un espace

- Et toi, tu ne bouges pas ?
- Non, je ne dois pas, sinon, il va croire des choses, rester ainsi, personne ne se perd, on y gagne tous les deux.
- Mais tout de même, t'en a pas envie ?
- Ben l'envie, le plaisir, tout ça, ça se gère, si je cède à l'envie, me restera-t-il le plaisir ensuite, après, après ça fait peur, alors que là c'est comme une ébauche, une aquarelle pleine de couleur : on image le bateau, le trait soulignant le clapotis de la voile, mais ce n'est pas fini, alors on peut imaginer, se raconter ce que ça aurait pu devenir, un classique ou un chef d'oeuvre, c'est ça tu vois le plus difficile, vivre avec ce "on ne sait pas", et puis l'accepter puis l'assumer, ne pas vouloir gérer le futur, ça c'est puisant, trop facile sinon, j'aime pas la banalité.
- T'es tordue tout de même, moi à ta place, je galoperais au rdv, trop romantique comme proposition.
- Non, je l'assimile comme un possible et puis l'oublier pour repartir ailleurs, pour garder le regard émerveillée, prête à découvrir, je bloque le temps, j'immortalise un souvenir.
- Ouais, en gros, t'as peur de te planter.
- Oh tu es lourdingue, je ne suis pas hyper protectionneuse, au contraire avec ma moissonneuse, j'engrange chaque petit grain de mot, je garde les épis comme des trésors, mais tu vois une fois que la benne est remplie, faut la vider. Et moi j'ai pas envie de recommencer le même champs.
- Donc, tu ne veux pas t'attacher ! Mais tu désires pas le retrouver, quand même ?
- J'ai pas envie de ressembler à la chèvre de M. Seguin.